Si vous n’êtes pas familier avec le Fediverse, je recommande vivement de regarder cette vidéo d’Arte, qui offre un excellent point de départ. Pour moi, cela a été un révélateur. J’avais déjà entendu parler de plateformes comme Mastodon, PeerTube et Mobilizon, mais ce n’est qu’en les étudiant plus en détail que j’ai réalisé la complexité et la richesse de cet écosystème.
Qu’est-ce que le Fediverse ?
Le Fediverse, combinaison des termes « fédération » et « univers », désigne un réseau de plateformes sociales décentralisées, interconnectées par des protocoles ouverts tels que ActivityPub (un protocole qui facilite la communication entre différentes plateformes et permet le partage de contenu). Imaginez-le comme une constellation où chaque étoile représente un serveur indépendant, appelé « instance », tout en étant capable d’interagir avec les autres. Cela signifie que vous pouvez utiliser Mastodon et suivre des comptes sur PeerTube sans changer de plateforme.
Ce qui distingue le Fediverse, c’est sa capacité à redonner le contrôle aux utilisateurs. Contrairement aux grandes entreprises technologiques qui collectent et exploitent vos données, le Fediverse permet une véritable autonomie. Chaque utilisateur choisit une instance qui correspond à ses valeurs et à ses centres d’intérêt, et chaque instance fonctionne selon ses propres règles et modes de gestion.
Cette structure favorise une plus grande diversité d’opinions et une liberté d’expression qui s’affranchit de la censure et de la surveillance omnipresente sur les réseaux sociaux centralisés. Le Fediverse devient ainsi un espace où les utilisateurs peuvent évoluer sans être manipulés par des algorithmes motivés par le profit.
Les Défis de l’Adoption
Adopter le Fediverse n’est pas sans difficultés. Voici quelques défis de base :
Complexité technique : Le choix d’une instance et la compréhension des différences entre plateformes telles que Mastodon, Friendica ou Mobilizon peuvent s’avérer déroutants pour un nouvel utilisateur. La prise en main n’est pas aussi intuitive que sur les réseaux centralisés.
Fragmentation des communautés : Les petites instances offrent des environnements plus intimes, mais cela peut limiter la portée des interactions.
Recherche de contenu : Sans algorithmes puissants pour vous orienter, il faut s’habituer à chercher activement du contenu pertinent. Bien que cela demande plus d’efforts, cela peut aussi être enrichissant.
Les Fondements Philosophiques et Sociologiques
Le Fediverse repose sur des principes clés :
Décentralisation : Cette structure distribue le pouvoir et prévient la concentration des autorités technologiques. Elle s’inspire de philosophies qui valorisent la liberté individuelle et la responsabilisation des utilisateurs.
Autonomie communautaire : Chaque instance fonctionne comme une petite entité sociale, avec ses propres règles, reflétant la diversité des personnes qui la composent.
Interopérabilité : L’adoption de protocoles ouverts stimule la collaboration et l’innovation, contrastant avec les systèmes fermés et centralisés.
Ces principes redéfinissent la manière dont nous envisageons l’internet. Le Fediverse n’est pas seulement un outil technologique, c’est un cadre qui réinterprète la notion de communauté et de participation en ligne, en mettant en avant la diversité et la liberté d’expression.
En explorant le Fediverse, j’ai redécouvert ce que signifie faire partie d’une communauté en ligne sans être influencé par des algorithmes dictés par des intérêts financiers. C’est un espace qui favorise la réflexion et le retour à l’essentiel. Si vous souhaitez tenter l’expérience, sachez que la liberté numérique demande un apprentissage et une adaptation, mais l’effort en vaut la peine.
Le permacomputing est à la fois un concept et une communauté de pratique orientée vers la résilience et la régénérativité des technologies informatiques et des réseaux, inspirée par la permaculture. À une époque où l’informatique symbolise le gaspillage industriel et l’exploitation, le permacomputing propose une approche plus durable, en maximisant la durée de vie des matériels, en minimisant la consommation d’énergie et en se concentrant sur l’utilisation des ressources computationnelles déjà disponibles.
Fondements du Permacomputing
Le permacomputing repose sur plusieurs principes clés, souvent en résonance avec des idées comme la sagesse (wisdom), la connaissance (knowledge), et l’éthique (ethics):
Durabilité : Minimiser l’empreinte écologique de l’informatique en optimisant l’efficacité énergétique, en prolongeant la durée de vie des matériels, et en favorisant le recyclage et la réutilisation. Cela inclut des concepts tels que le design for disassembly, qui assure que tous les éléments d’un produit peuvent être démontés pour réparation ou recyclage.
Résilience : Concevoir des systèmes capables de fonctionner dans des conditions adverses et de s’adapter aux changements environnementaux et sociaux, en incluant des stratégies comme le salvage computing et le collapse computing.
Éthique : Promouvoir une informatique respectueuse des droits humains et de la vie privée, en adoptant des pratiques de développement transparentes et inclusives. Cela rejoint les valeurs du mouvement solarpunk, qui imagine des futurs optimistes et durables.
Simplicité : Favoriser des solutions technologiques simples et robustes, évitant la complexité inutile qui conduit souvent à une consommation excessive de ressources.
Interdépendance : Encourager la collaboration et l’échange de connaissances entre les disciplines et les communautés pour créer des solutions informatiques holistiques et intégrées.
Objectifs du Permacomputing
Le permacomputing vise à transformer notre approche de l’informatique en :
Maximisant la durée de vie du matériel : En prônant la planned longevity plutôt que l’obsolescence programmée.
Minimisant l’usage d’énergie : Utiliser des ressources computationnelles de manière frugale et efficace, n’utilisant l’informatique que lorsqu’elle a un effet bénéfique sur les écosystèmes.
Encourageant l’autonomie technologique : En développant des outils et des infrastructures permettant aux communautés de répondre à leurs propres besoins technologiques de manière autonome et durable.
Favorisant l’équité numérique : En rendant les technologies accessibles à tous, indépendamment des barrières économiques ou géographiques.
Protégeant la biodiversité numérique : En préservant et en diversifiant les écosystèmes logiciels, en favorisant l’usage de logiciels libres et ouverts.
Éduquant et sensibilisant : En informant le public et les décideurs sur les impacts environnementaux et sociaux de l’informatique et en promouvant des pratiques plus durables.
Pratiques et Techniques du Permacomputing
Design for Disassembly
Le design for disassembly garantit que tous les éléments d’un produit peuvent être démontés pour réparation ou recyclage, prolongeant ainsi le cycle de vie du produit. Cela inclut l’utilisation de fixations mécaniques simples au lieu d’adhésifs et l’étiquetage clair des composants avec leur type de matériau. Cette approche permet de quantifier et de concrétiser la fabrication écologiquement responsable.
Emulation et Encapsulation
Pour préserver l’accès aux données numériques à travers le temps, des techniques comme l’emulation et l’encapsulation sont utilisées. L’émulation permet de simuler le comportement d’anciens matériels avec des logiciels modernes, tandis que l’encapsulation implique l’encapsulation des données numériques dans des enveloppes physiques et logicielles, indiquant aux utilisateurs futurs comment les reconstruire.
Salvage Computing
Le salvage computing (informatique de récupération) consiste à utiliser uniquement des ressources computationnelles déjà disponibles, souvent en réutilisant des composants trouvés dans des décharges électroniques. Cette approche valorise la récupération et le réemploi des matériels en fin de vie, les transformant en ressources renouvelées. Les dispositifs récupérés peuvent être combinés pour créer de nouveaux systèmes robustes et fonctionnels, réduisant ainsi le besoin de nouvelles productions et limitant le gaspillage.
Collapse Computing
Le collapse computing (informatique de l’effondrement) se concentre sur l’utilisation des technologies informatiques dans des scénarios où les infrastructures industrielles ou de réseau ont échoué ou sont inaccessibles. Cette pratique privilégie les besoins communautaires et vise à contribuer à un commun de connaissances pour maintenir l’informatique dans des contextes de crise. Il s’agit de tirer parti des ressources disponibles et de les adapter pour répondre aux besoins essentiels, en assurant la continuité des pratiques informatiques même en cas de collapsus infrastructurel.
Concepts de Résilience
Le permacomputing intègre également des concepts de résilience pour assurer la pérennité des systèmes informatiques :
Agilité : La capacité à s’adapter rapidement à un environnement changeant.
Préparation : La capacité à réfléchir aux menaces passées et à innover après une crise.
Élasticité : La flexibilité des relations entre les personnes et les choses au sein d’une organisation et d’un écosystème plus large.
Redondance : La duplication intentionnelle de composants critiques pour augmenter la fiabilité d’un système.
Principes et Propriétés du Permacomputing
Les principes du permacomputing sont :
Care for life (Prendre soin de la vie)
Care for the chips (Prendre soin des puces)
Keep it small (Garder les choses simples)
Hope for the best, prepare for the worst (Espérer le meilleur, se préparer au pire)
Keep it flexible (Garder la flexibilité)
Build on solid ground (Construire sur des bases solides)
Amplify awareness (Amplifier la prise de conscience)
Expose everything (Tout exposer)
Respond to changes (Répondre aux changements)
Everything has a place (Tout a sa place)
Ces principes se manifestent concrètement sous diverses formes, mettant en évidence les propriétés suivantes :
Accessible : Bien documenté et adaptable aux besoins individuels.
Compatible : Fonctionne sur diverses architectures.
Efficient : Utilise le moins de ressources possibles (énergie, mémoire, etc.).
Flexible : Modulaire, portable, adaptable à divers cas d’utilisation.
Resilient : Réparable, descent-friendly, offline-first, faible maintenance, conçu pour le démontage, planifié pour la longévité, durée de vie maximisée.
Comparaison entre Green IT et Permacomputing
Bien que le mouvement Green IT et le permacomputing poursuivent des objectifs similaires de durabilité, ils diffèrent par leur approche et leurs priorités.
Green IT :
Objectifs : Réduire l’empreinte écologique des technologies de l’information et de la communication (TIC), optimiser l’efficacité énergétique et promouvoir des pratiques responsables en matière de gestion des déchets électroniques.
Approche : Souvent top-down, avec des normes, des réglementations et des pratiques mises en œuvre par des entreprises et des institutions.
Exemples de Pratiques : Mise en place de politiques de gestion de l’énergie dans les centres de données, adoption de technologies de refroidissement économes en énergie, programmes de recyclage pour les équipements informatiques.
Permacomputing :
Objectifs : Créer des systèmes informatiques résilients et régénératifs, maximiser la durée de vie des matériels et minimiser l’utilisation d’énergie, réutiliser et adapter les ressources computationnelles déjà disponibles.
Approche : Bottom-up, avec une approche communautaire et collaborative, mettant l’accent sur l’auto-suffisance et l’adaptation locale.
Exemples de Pratiques : Réparation et prolongation de la durée de vie des équipements existants, utilisation de logiciels libres et ouverts pour garantir la pérennité et l’accessibilité, mise en place de systèmes informatiques capables de fonctionner hors ligne et dans des environnements à faible énergie.
Conclusion
Le permacomputing propose une vision novatrice et nécessaire pour l’avenir de l’informatique, en réponse aux défis environnementaux et sociaux actuels. En adoptant ces principes, nous pouvons concevoir des technologies plus respectueuses de notre planète et plus équitables pour tous. Pour ceux qui souhaitent explorer davantage ce mouvement, voici une liste de ressources en ligne :
En adoptant le permacomputing et en s’inspirant de mouvements comme le solarpunk, nous pouvons non seulement améliorer la durabilité de nos systèmes technologiques, mais aussi créer un monde numérique plus juste et résilient pour les générations futures.